Virevoltant de fleur en fleur pour y déployer leurs ailes richement
colorées, les papillons nous fascinent. Mais l’inquiétude règne : 50 % de la
population des papillons a disparu en Europe en 15 ans. Dans notre région,
une dizaine de variétés seulement est observée. Les jardiniers
pourraient-ils séduire eux-aussi les papillons ?
Les jardins représentent 1 million d’hectares en France, quatre fois
plus que les réserves naturelles. Chaque jardinier a donc un rôle important
à jouer dans la conservation de la biodiversité.
Les papillons n’aiment guère les jardins tirés à quatre épingles, le tendre
fouillis leur va en revanche à merveille. Ils aiment les arbres pour
s’abriter du vent, le lierre pour s’abriter du froid ! Si les plus courageux
migrent l’hiver vers des cieux plus cléments, nombre d’entre eux, plus
téméraires, hivernent dans nos contrées.
Les arbustes comme les abélias, les aubépines, les lilas, les spirées
rencontrent un franc succès : sublime nectar à déguster.
Jaune et mauve
Ils ont horreur des jardins monotones, uniformes, aux fleurs alambiquées, où
il n’y a rien à siroter. On pourrait penser qu’ils ne sont là que pour le
plaisir mais ils assurent en fait eux aussi la pollinisation. Les fleurs et
les papillons se livrent à une séduction réciproque. Parmi les nectars les
plus prisés : l’achillée, la bourrache, la lavande, la scabieuse, la
valériane, le knautia, la rose trémière.
Des floraisons étalées au fil des saisons leur permettront de s’installer
durablement. Aubriete, jacinthe, delphinium pour le printemps ; phlox,
verveine pour l’été ; aster, sedum et cimicifuga pour l’automne, accompagnés
de quelques fruits fermentés, un réel délice ! Les campagnardes, les « très
nature », les fleurs aux coloris jaune comme l’héliopsis ou mauve comme les
asters d’automne sont leurs préférées. Ces deux couleurs les attirent de
façon irrésistible.
Ils apprécieront votre carré d’aromatiques : thym, basilic, ciboulette, en
pot ou en pleine terre. Mais aussi le sublime Machaon hivernera sur les
tiges du fenouil.
Dès la plus tendre enfance, on nous raconte que le merveilleux papillon est
d’abord une vilaine petite chenille. Ces dernières sont les hôtes
privilégiés de certaines plantes. Des liens très étroits s’établissent alors
comme pour le flambé et le prunellier, le grand mars changeant et le saule,
les tapis de violettes pour le Grand Nacré, le Petit Collier Argenté, la
Petite Violette. L’ortie est indispensable au développement et à la
reproduction du Paon du jour, du Vulcain, de la Belle Dame qui font la joie
des enfants. Le chardon, notamment la cardère, et les graminées sont aussi
des hôtes remarquables.
Pas d’invasion de chenilles à craindre : les oiseaux, les batraciens, les
chauves souris veillent sur la surpopulation, merveilleux équilibre à ne pas
perturber.
Symbole de liberté
Laissez un carré d’herbes folles et de fleurs sauvages au jardin, loin du
tumulte des machines : succès assuré sans effort ! Ne négligez pas l’eau
pour toute cette faune. Définitivement vous abandonnerez les polluants
inventés par les gens qui n’ont jamais pris le temps d’observer la nature et
qui n’imaginent pas à quel point ils mettent en péril les équilibres de la
vie, y compris la nôtre.
Un chiffre incroyable : 8 000 tonnes de produits sanitaires, vendus par an
aux jardiniers, responsables d’un quart de la pollution des eaux de surface
et des nappes phréatiques ! À méditer… pour que les papillons restent à
jamais symbole de liberté et d’espoir.
SYLVIE FONTAINE (la Voix du Nord samedi 22 mars 2008)