SYLVIE FONTAINE (la Voix du Nord samedi 22 mars 2008)

JARDINS
Ils disparaissent à grande vitesse : les papillons ont besoin de vous…

 

 Le Paon du jour pond ses oeufs sur l’ortie et hiverne au jardin. Photo «La Voix»

Virevoltant de fleur en fleur pour y déployer leurs ailes richement colorées, les papillons nous fascinent. Mais l’inquiétude règne : 50 % de la population des papillons a disparu en Europe en 15 ans. Dans notre région, une dizaine de variétés seulement est observée. Les jardiniers pourraient-ils séduire eux-aussi les papillons ?
Les jardins représentent 1 million d’hectares en France, quatre fois plus que les réserves naturelles. Chaque jardinier a donc un rôle important à jouer dans la conservation de la biodiversité.
Les papillons n’aiment guère les jardins tirés à quatre épingles, le tendre fouillis leur va en revanche à merveille. Ils aiment les arbres pour s’abriter du vent, le lierre pour s’abriter du froid ! Si les plus courageux migrent l’hiver vers des cieux plus cléments, nombre d’entre eux, plus téméraires, hivernent dans nos contrées.
Les arbustes comme les abélias, les aubépines, les lilas, les spirées rencontrent un franc succès : sublime nectar à déguster.
 

Jaune et mauve
Ils ont horreur des jardins monotones, uniformes, aux fleurs alambiquées, où il n’y a rien à siroter. On pourrait penser qu’ils ne sont là que pour le plaisir mais ils assurent en fait eux aussi la pollinisation. Les fleurs et les papillons se livrent à une séduction réciproque. Parmi les nectars les plus prisés : l’achillée, la bourrache, la lavande, la scabieuse, la valériane, le knautia, la rose trémière.
Des floraisons étalées au fil des saisons leur permettront de s’installer durablement. Aubriete, jacinthe, delphinium pour le printemps ; phlox, verveine pour l’été ; aster, sedum et cimicifuga pour l’automne, accompagnés de quelques fruits fermentés, un réel délice ! Les campagnardes, les « très nature », les fleurs aux coloris jaune comme l’héliopsis ou mauve comme les asters d’automne sont leurs préférées. Ces deux couleurs les attirent de façon irrésistible.

Pas de surpopulation
Ils apprécieront votre carré d’aromatiques : thym, basilic, ciboulette, en pot ou en pleine terre. Mais aussi le sublime Machaon hivernera sur les tiges du fenouil.
Dès la plus tendre enfance, on nous raconte que le merveilleux papillon est d’abord une vilaine petite chenille. Ces dernières sont les hôtes privilégiés de certaines plantes. Des liens très étroits s’établissent alors comme pour le flambé et le prunellier, le grand mars changeant et le saule, les tapis de violettes pour le Grand Nacré, le Petit Collier Argenté, la Petite Violette. L’ortie est indispensable au développement et à la reproduction du Paon du jour, du Vulcain, de la Belle Dame qui font la joie des enfants. Le chardon, notamment la cardère, et les graminées sont aussi des hôtes remarquables.
Pas d’invasion de chenilles à craindre : les oiseaux, les batraciens, les chauves souris veillent sur la surpopulation, merveilleux équilibre à ne pas perturber.

Symbole de liberté
Laissez un carré d’herbes folles et de fleurs sauvages au jardin, loin du tumulte des machines : succès assuré sans effort ! Ne négligez pas l’eau pour toute cette faune. Définitivement vous abandonnerez les polluants inventés par les gens qui n’ont jamais pris le temps d’observer la nature et qui n’imaginent pas à quel point ils mettent en péril les équilibres de la vie, y compris la nôtre.
Un chiffre incroyable : 8 000 tonnes de produits sanitaires, vendus par an aux jardiniers, responsables d’un quart de la pollution des eaux de surface et des nappes phréatiques ! À méditer… pour que les papillons restent à jamais symbole de liberté et d’espoir.

SYLVIE FONTAINE (la Voix du Nord samedi 22 mars 2008)